samedi 1 septembre 2012

Sophie Calle à Arles : Chez ces gens là, on ne pleure pas

Un peu après la bataille, voici mon retour du festival de la photographie d’Arles
Le fil conducteur de cette année, la prestigieuse Ecole Nationale Supérieure de la Photographie d’Arles, pouvait laisser penser à une édition moins riche. Mais j’y ai découvert de très bonnes expositions et de jolies surprises.

Je reviendrai peut être en détails dans un autre post sur mes coups de cœur. Aujourd’hui j’avais envie de parler de l’exposition hors les murs de Sophie Calle intitulée « Pour la dernière et pour la première fois ».


L’histoire se passe à Istanbul.
« La dernière fois », c’est la dernière image en photos et en mots de personnes qui ont subitement perdu la vue.
« La première fois », c’est la projection simultanée de courts métrages qui montrent différentes personnes aveugles, face à la mer, qu’ils n’ont jamais vu.

J’ai été particulièrement émue par cette seconde partie de l’exposition. Comme toujours, je trouve qu’à travers des histoires individuelles, Sophie Calle arrive à toucher l’universel et faire écho à des douleurs personnelles.

La scénographie du lieu y était pour beaucoup. Nous sommes projetés dans une pièce sombre, cernés d’écrans où défilent en boucle les courts métrages, envahis par le bruit incessant de la houle, ne sachant où porter son regard.

J’ai été saisie par le courage de ces hommes et ces femmes, plus ou moins jeunes, qui ont accepté d’offrir leur visage nu au voyeurisme de la caméra chargée de saisir en gros plan l’expression de la moindre émotion. Ainsi livrés à l’indiscrétion de nos yeux qui peuvent voir.
La dignité de ces personnes, appartenant à une culture, un âge ou une classe sociale où les émotions ont peu de place.
Leur retenue, comme une acceptation de leur condition, pendant de longues minutes…puis, insidieusement, la vague de tristesse, qui vient de loin, et finit par envahir leur visage. La mer qui monte dans leurs yeux inertes.
Et cette vague ultime, qu’on ne voit pas mais qu’on imagine, qui les submerge de chagrin. J’avais envie de crier cette injustice à leur place, de hurler leur désespoir.
Après, le chant sourd et hypnotique de la mer qui lave la tristesse, berce les cœurs et apaise les esprits.

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